Épouvantail – Pelaez, Sénégas

Lily vit dans une ferme avec son père, sa belle-mère, Minette, Chevrette et les Poulettes. Sa maman, dixit son paternel, est partie faire des spectacles de magie sur des bateaux autour du monde, mais un jour, bien sûr elle reviendra. En attendant, Lily râle sur belle-maman, et aime bien aller papoter avec l’épouvantail qui surveille le champ, vers l’étang.

J’ai fait un cauchemar. Un de ceux qui se nourrissent des vivants. Il me tournait le dos. Immobile. Il se rapprochait. Je glissais lentement au-dessus du sol…
… Et soudain, dans le silence assourdissant de l’obscurité.. Il s’est retourné. Les coutures de son sourire ont sauté. Ses yeux faits de deux boutons se sont allumés d’une lueur jaune. Je ne pouvais pas bouger. Ses bras de bois se sont soudain agités et à leurs extrémités ont proliféré des serpents de doigts, entortillés telles les racines d’un arbre mauvais. Son manteau s’est ouvert sur un cep de treille noueux et putrescent qui ondulait comme une vis sans fin. Son sourire écartelé par les lames de ses dents affûtées lui mangeait le visage. Je ne pouvais détacher mon regard de ses yeux de lune fauve. Il chantait..
Promenons-nous dans les bois, pendant que le loup n’y est pas

L’épouvantail, c’est le dernier souvenir de sa mère, à Lily. Et sa mère était magicienne, une vraie, à tendance un peu sorcière, même, ce qui faisait jaser au village.
L’épouvantail, un beau, un vrai bien en paille, bien malpoli aussi, et ronchon, c’est un peu le seul ami de Lily. Mais elle n’est pas la seule à s’intéresser à lui. Quelques temps plus tôt, le père de Lily a sauvé un homme d’un accident de voiture tragique. La femme y est restée, dans l’étang, et le survivant est hanté par l’épouvantail, qui trônait au-dessus d’eux, dans son champ. Et cette histoire intrigue bien tant le capitaine de la gendarmerie, qui ne cesse de s’en gratter la tête et l’âme.

Alors là, lectrice, lecteur, mon camembert, on est dans un album au moins aussi beau et bien que le très beau et bien Trois ombres, de Cyril Pedrosa (et j’avais grave kiffé Trois ombres). Tout en noir et blanc et en traits, le dessin et l’histoire oscille entre conte fantastique et enquête policière, entre peur et amusement. La petite Lily se retrouve aux prises avec un épouvantail ma foi assez flippant, dont on ne sait quels sont ses intentions. Et tandis que le capitaine de la gendarmerie observe la petite famille de loin, persuadé que quelque chose cloche avec cet accident de voiture, le père et la belle-mère tente de comprendre comment protéger et parler à leur petite, sauvage et attristée.

Les planches sont sublimes, donnant le ton d’une page à l’autre de la dimension fantastique, onirique, terrifiante ou humoristique, le dessin joue à merveille sur les textures et donne un toucher fou et une ambiance qui nous englobe et nous plonge dans cette histoire d’apparence complexe et dont les fils se nouent et se dénouent avec surprise, émotion et tremblements.

Une très très belle BD (dont tu peux lire un extrait sur le site de Dargaud, pour découvrir les merveilleux dessins) qui te fera une lecture parfaite pour les dimanches automnaux qui s’installent.

Éditions Dargaud

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